Arachide, lait, poissons ou œufs, beaucoup d'aliments du quotidien sont causes d'allergies chez les enfants et les adultes. Une diététicienne nous éclaire pour décrypter en détail les allergies alimentaires.
Difficile, au quotidien, de ne pas faire de ses repas de véritables casse-tête et d'avoir une vie sociale équilibrée lorsqu'on souffre d'allergies alimentaires. À la cantine, au restaurant, chez les amis ou sur les produits vendus en supermarché, scruter les ingrédients et les étiquettes est non seulement chronophage mais aussi excluant. Pourtant, en France, selon l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), 3,5 % des adultes et 8 % des enfants sont concernés par les allergies alimentaires. Symptômes respiratoires, cutanés ou digestifs, les manifestations peuvent être plus ou moins graves et il ne s'agit pas de les prendre à la légère. On fait le point avec Aline Victor, diététicienne chez Nutrisens, spécialiste de la nutrition clinique et de l'alimentation médicale.
Qu'est-ce qu'une allergie alimentaire ?
Une allergie alimentaire implique une réaction anormale du système immunitaire suite à la consommation d'un aliment. Les réactions surviennent immédiatement après l'ingestion. Lors du premier contact avec un allergène, des IgE (anticorps) spécifiques sont produits (pollen, protéines alimentaires, acariens...). Cette phase dite de sensibilisation est cliniquement silencieuse. Si ces contacts viennent à se répéter, les IgE vont être produits en grande quantité, entraînant des réactions inflammatoires. Cette phase peut conduire à un choc anaphylactique. Les allergies alimentaires sont plus fréquentes chez l'enfant que chez l'adulte.
Quels sont les symptômes et les manifestations ?
Les symptômes varient selon l'âge (enfant et adulte). Ils peuvent apparaître à plusieurs niveaux :
Peau : rougeurs, picotements, plaques rouges (urticaire), eczéma;
Voies respiratoires : rhinite, asthme, éternuements, toux, difficulté à respirer;
Système digestif : picotements de la bouche, difficulté à avaler, nausées, vomissements, douleur abdominale, diarrhées, coliques, reflux gastro-œsophagien (RGO);
Système cardiovasculaire : hypotension.
Entre la naissance et un an, 80 % des enfants allergiques à un aliment déclarent des manifestations de type eczéma. En cas d'inconfort digestif, il faut penser à une réaction allergique surtout si l'un des parents est allergique.
Quelles sont les allergies alimentaires les plus fréquentes ?
Les aliments le plus souvent responsables d'allergies sont le lait, les œufs, les arachides, les poissons et le soja. Bien qu'elles puissent être diagnostiquées pendant l'enfance, les allergies aux arachides, poissons et fruits de mer sont en revanche les plus fréquentes chez l'adulte. À ce titre, depuis 2011, une réglementation européenne oblige les professionnels de l'alimentation à signaler la présence des 14 allergènes majeurs sur leurs produits.
Les allergies évoluent-elles avec l'âge ?
Selon l'allergène, l'allergie alimentaire peut se déclarer très tôt dans l'enfance ou à l'âge adulte. Son évolution n'est pas toujours la même puisqu'elle peut disparaître une fois adulte ou persister pendant toute la vie.
La majorité des enfants voit leur allergie se résoudre, et ce, souvent avant l'âge scolaire. Les allergies au lait et aux œufs disparaissent souvent entre un et trois ans. En revanche, on peut trouver des résistances pour les fruits à coque, les poissons et les arachides.
Quelles sont les principales causes des allergies alimentaires (aujourd'hui en nette augmentation) ?
Différentes hypothèses sont étudiées pour expliquer l'origine et l'augmentation de la survenue des allergies alimentaires :
- Le manque de variété dans notre alimentation : surconsommation d'un aliment ou à l'inverse une diversité qui nous expose à des produits plus exotiques;
- La présence d'additifs alimentaires dans les produits industriels;
- La pollution atmosphérique (qui diminue sensiblement nos seuils de tolérance);
- La diminution de l'allaitement maternel des nouveau-nés;
- Une hygiène trop importante chez les enfants qui ne permet pas de développer leur système immunitaire de façon optimale;
- Une consommation précoce de certains aliments ou à l'inverse trop tardive.
Bien qu'il existe des prédispositions génétiques, l'environnement joue un rôle majeur. À noter qu'il existe aussi des allergies croisées pouvant être déclenchées par deux substances différentes qui contiennent les mêmes éléments allergènes. Par exemple, une personne peut être allergique à la fois au pollen du bouleau et à la pomme.
Au quotidien, comment éviter les risques de déclencher une allergie ?
Au regard des hypothèses exposées à la question précédente, les risques pourraient être évités en agissant sur notre environnement et nos modes de consommation.
Si on prend l'exemple du gluten chez le nourrisson, le comité de nutrition de la Société européenne de gastro-entérologie, hépatologie et nutrition pédiatrique (ESPGHAN) recommande « d'introduire le gluten entre l'âge de 4 et 6 mois, en petite quantité, de façon progressive, tout en maintenant l'allaitement maternel ».
Cuisiner soi-même ses plats le plus possible ou veiller à limiter les plats industriels contenants une longue liste d'additifs (identifiés par un code en E+3 chiffres) est un bon réflexe.
Au restaurant, le patron doit apposer sur son menu le logo ou la mention « fait maison » pour garantir la réalisation totale du plat servi. En l'absence d'indications, il est fort probable que le plat soit assemblé ou surgelé.
Quelles sont les mentions à regarder en priorité sur les emballages ?
Tout produit contenant des allergènes fait l'objet d'un étiquetage obligatoire. L'allergène doit figurer en gras, en italique ou souligné dans la liste des ingrédients. La liste des 14 allergènes majeurs est disponible sur le site Economie.gouv.fr.
Par exemple, si la recette met en œuvre de la lécithine issue de soja en tant qu'émulsifiant, celle-ci devra être mentionnée en tant que telle dans la liste des ingrédients « émulsifiant : lécithine de soja », et non « émulsifiant : lécithine » ou « émulsifiant : E322 ».
Attention, la présence d'allergènes liée à une contamination involontaire par contact avec d'autres produits pendant la fabrication n'est pas impossible. Une indication en fin de liste d'ingrédients comme « peut contenir des traces de… » ou « susceptible de contenir des… » peut être utilisée dans le cas où il n'est pas possible de maîtriser ce risque.
Seuls les plats spécifiques désignés par une mention de type « garantit la maîtrise des 14 allergènes majeurs » sont recommandés pour les personnes souffrant d'allergies alimentaires.
Pour les produits non préemballés, l'indication de la présence d'allergènes se fait obligatoirement par écrit, à proximité du produit concerné, de façon à ce qu'il n'existe aucun doute pour le consommateur.