Santé

AVC : où en est la recherche ?

Alors que l'AVC fait chaque année de plus en plus de victimes, la recherche s'attache particulièrement à prévenir, traiter et éviter la récidive de ces infarctus cérébraux. On a fait le point avec deux professeurs qui nous expliquent les enjeux à court terme.

En France, chaque année, ce sont 140 000 personnes qui sont victimes d'un accident vasculaire cérébral (AVC), entraînant 30 000 décès. C'est d'ailleurs la première cause de mortalité chez la femme. Véritable enjeu de santé publique, l'AVC, qu'il soit ischémique (80 % des cas) ou hémorragique (20 % des cas), doit être pris en charge immédiatement afin de limiter les séquelles. C'est la raison pour laquelle, à l'occasion de la Journée mondiale de l'AVC du 29 octobre, les médecins se mobilisent cette année avec une campagne intitulée « Chaque minute compte ». Nous avons d'ailleurs pu échanger avec les professeurs Olivot et Cordonnier, coordinateurs de Strokelink, un réseau de recherche clinique labellisé F-CRIN.

Sur quoi la recherche se concentre-t-elle le plus aujourd'hui ?

Professeur Olivot : En ce moment, la recherche clinique se concentre en priorité sur les aspects des premières heures de l'AVC, de la récupération des patients et de la prévention des récidives. Tous ces points se retrouvent dans le thème choisi pour la Journée mondiale de l'AVC de cette année « Chaque minute compte – Vite le 15 ! ». L'AVC est en effet d'autant plus grave, et les séquelles d'autant plus lourdes, lorsque le temps écoulé entre sa survenue et son traitement est long.

Quels sont les principaux enjeux de la recherche sur l'AVC ?

Professeur Cordonnier : Le premier est d'intervenir le plus vite possible. Pour cela, il est nécessaire que la population générale connaisse les signes qui évoquent un AVC : un bras ou une jambe brutalement lourds, une difficulté soudaine à parler, une partie du visage qui s'affaisse… À ce moment-là, il faut très vite appeler le 15.
Ensuite, la recherche s'occupe de limiter la destruction du cerveau, plus particulièrement l'étendue des lésions pendant les premières heures qui suivent l'AVC. Moins l'étendue des lésions sera importante et moins le patient aura de séquelles. Plusieurs protocoles sont en cours sur ce thème. Il faut également aider le cerveau à récupérer. Certains médicaments peuvent y contribuer et certaines techniques de rééducation sont aussi par exemple désormais accompagnées de robots. Enfin, il est nécessaire de prévenir la récidive car le risque est assez important chez les patients victimes d'AVC : 30 à 40 % d'entre eux feront un nouvel accident vasculaire cérébral dans les 5 ans qui suivent le premier. Un AVC laisse le corps fragilisé, la récidive aura donc d'autant plus de risques d'être mortelle, d'où l'intérêt de tout mettre en œuvre pour l'éviter.

Sur quelles études travaillez-vous actuellement ?

Professeur Cordonnier : Nous participons à plusieurs études dont une mondiale portant sur la prise en charge en urgence des hémorragies cérébrales (TICH3-Fr). Celle-ci est menée par moi-même et coordonnée au niveau international par le Royaume-Uni. Elle implique 145 pays dans le monde. C'est un essai randomisé évaluant l'acide tranexamique (un médicament qui arrête les saignements) dans les premières heures d'AVC hémorragique.
Une autre étude, menée par le professeur Olivot, vise à évaluer le bénéfice de la thrombectomie mécanique (technique qui consiste à déboucher l'artère cérébrale responsable de l'AVC). Elle a pour objectif d'étendre les indications des traitements de revascularisation aux patients victimes d'un infarctus cérébral étendu, en sélectionnant, grâce à l'imagerie multimodale, les patients susceptibles d'en bénéficier. Il existe encore une étude menée par le professeur Mazighi, qui évalue un nouveau médicament pour fluidifier le sang en complément de la thrombectomie afin d'améliorer la reperfusion cérébrale, tout en réduisant ses complications.

Quelles sont les nouvelles molécules permettant de diminuer le risque de récidive des AVC ?

Professeur Olivot : Plusieurs pistes sont en cours d'exploration : le développement de nouveaux médicaments pour fluidifier le sang, pour limiter l'inflammation ou pour mieux diminuer le cholestérol. Le professeur Amarenco étudie de nouveaux objectifs pour le traitement de l'hypertension et la dyslipidémie.

Quelles sont les avancées médicales majeures qui seront bientôt proposées aux patients ?

Professeur Olivot : Tout d'abord, il faut poursuivre le déploiement de nouveaux centres de thrombectomie afin de répondre aux besoins de la population. Par ailleurs, nos efforts se concentrent beaucoup sur les techniques endovasculaires : on pourra associer de nouveaux médicaments pour protéger le cerveau au moment où le vaisseau est débouché. Enfin, après un AVC lié à l'athérome (graisse dans les artères), la prise en charge globale intégrera de nouveaux médicaments pour fluidifier le sang, tout en limitant les saignements.

Propos recueillis par Marina Knittel
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