Fabriquer de l'eau de saule, c'est préparer une potion presque magique, dont les principes actifs vont favoriser l'apparition des racines sur les boutures. Mais cette hormone de bouturage, naturelle et gratuite, idéale pour les boutures hivernales à bois sec, ne s'obtient pas aussi simplement qu'on pourrait le croire. Il faudrait voir à ne pas confondre auxine et acide salicylique !
Le bouturage à bois sec est une course de longue haleine qui dure tout l'hiver et dont la ligne d'arrivée ne se franchit qu'au printemps. Sans parler de dopage, il est à noter que les participants dont les pieds auront été préalablement enduits d'hormones de bouturage ont plus de chances de finir sur le podium.
Un gros coup de pouce
L'eau de saule est un procédé empirique qui permet d'obtenir une hormone de bouturage à moindres frais, et de faire, au passage, un petit pied de nez aux hormones de synthèse du commerce. Qu'elles soient naturelles ou artificielles, le rôle de ces phytohormones est d'encourager l'apparition des racines sur les boutures. Leur utilisation est particulièrement indiquée dans le cas des boutures à bois sec, ou à bois dormant, que l'on effectue durant l'hiver pour multiplier les végétaux ligneux. En effet, leur écorce ayant tendance à agir comme un rempart qui gêne le développement des racines, les hormones de bouturage accélèrent le processus tout en améliorant de manière spectaculaire le taux de réussite.
Un facilitateur, c'est tout !
On croit généralement qu'il suffit de faire macérer durant une paire de semaines des tiges de saule, qu'il soit pleureur ou autre, dans un récipient d'eau pour obtenir une potion efficace. Certains les tronçonnent et les écrasent préalablement, d'autres encore les font bouillir en décoction pour accélérer le processus, mais qu'importe. L'opération permet essentiellement d'extraire le fameux acide salicylique, dont on a dérivé l'aspirine, et dont le saule est riche. Certes, c'est un puissant antiseptique, antibactérien, antifongique, dont la présence est bénéfique afin d'empêcher le pourrissement des boutures. C'est lui aussi qui, d'ordinaire, provoque la fermeture des stomates situés sur le revers des feuilles en cas de stress hydrique, de manière à réduire l'évapotranspiration. Ainsi va-t-il permettre de limiter le dessèchement des boutures, ce qui est précieux. Mais ce n'est pas lui qui induit réellement le développement des racines.
Changer d'identité
La véritable hormone de bouturage qui stimule directement la rhizogénèse, c'est-à-dire l'apparition de nouvelles racines, c'est l'auxine. Elle seule est capable de provoquer des changements identitaires dans les cellules végétales, et de contraindre un bout d'écorce à se transformer en radicelles si celui-ci se retrouve enfoncé dans la terre. Toutes les plantes contiennent de l'auxine, mais les parties végétales qui en concentrent le plus sont justement les racines spontanées, notamment celles qui sont émises par les plantes qui se marcottent naturellement, comme la ronce et… le saule.
Bouturer pour pouvoir bouturer
Voilà pourquoi la véritable recette d'eau de saule riche en auxine s'obtient en laissant les tiges de saule s'enraciner dans l'eau pendant quinze à vingt jours. L'eau de macération, qui s'est sensiblement épaissie, peut alors être utilisée comme hormone de croissance en badigeonnant la base des boutures avant de les enfoncer dans le terreau. Par la suite, s'il en reste, vous pouvez diluer ce gel liquide afin d'enrichir l'eau avec laquelle vous allez les arroser durant tout le temps de leur maturation.
Sine qua non ?
Le recours aux hormones de bouturage est quasiment indispensable pour multiplier les plantes les plus rétives au bouturage : bougainvillier, rhododendron, mahonia, houx, camélia, bignone…