Cancer, maladie de Parkinson, hémopathie… l'utilisation de produits phytosanitaires a des conséquences dramatiques à long terme sur la santé des travailleurs agricoles. Un nouveau fonds d'indemnisation entend épauler les victimes.
Après des décennies de combat et d'études scientifiques, on sait aujourd'hui avec certitude que les produits phytosanitaires ont non seulement un impact environnemental désastreux mais qu'ils nuisent également à notre santé. Petit à petit, les autorités retirent donc du marché les pesticides les plus dangereux. Il n'empêche, des milliers de personnes seraient atteintes de maladies graves provoquées par une exposition prolongée à toutes ces substances chimiques nocives. Et si les riverains peuvent être aussi touchés, les agriculteurs sont en première ligne…
Le combat vers la reconnaissance du risque
Alors que 100 000 travailleurs agricoles seraient concernés par le risque d'exposition aux pesticides, les institutions estiment que 10 000 d'entre eux seraient des victimes potentielles rendues malades à cause de l'utilisation répétée de ces produits. Pour permettre leur prise en charge, l'État a progressivement complété la liste des pathologies d'origine professionnelle liées aux produits phytosanitaires reconnues par le Code rural. Cette inscription dispense en effet la personne concernée de devoir apporter la preuve du lien entre sa maladie et son exposition aux substances nocives. C'est par exemple le cas de la maladie de Parkinson depuis 2012, tout comme certaines « homéopathies malignes provoquées par les pesticides » depuis un décret de 2019.
Afin d'améliorer la connaissance du risque, l'enquête nationale Agrican suit, en outre, quelque 180 000 assurés agricoles actifs et retraités sur onze départements depuis 2005. Or, les bilans périodiques de ces travaux mettent en évidence que certains types de cancers, tels que le mélanome de la peau, le myélome multiple, le cancer de la prostate, des lèvres, de l'ovaire, du système nerveux central ou encore les lymphomes, se développent davantage chez les agriculteurs par rapport à la population générale.
Une meilleure prise en charge
Dès lors que la maladie d'un salarié est reconnue comme étant d'origine professionnelle, il peut prétendre aux prestations versées par les régimes général et agricole. En revanche, l'indemnisation des non-salariés agricoles, tels que le chef d'exploitation ou ses collaborateurs, était auparavant assez faible. Pour dédommager leur préjudice et leur permettre de faire face à leurs frais de santé, la loi de finances de la Sécurité sociale pour 2020 a donc créé un Fonds d'indemnisation des victimes de pesticides (FIVP), entré en vigueur à travers un décret paru au Journal officiel du 29 novembre 2020.
Si le projet remonte à 2016, il aura fallu du temps pour qu'il aboutisse en perdant toutefois de sa substance au passage, au grand dam des associations. Alors que l'idée originale visait en effet à instaurer une réparation intégrale englobant les préjudices économiques, physiques, professionnels, moraux et familiaux, le système retenu se limite à une indemnité forfaitaire réservée à une catégorie précise de victimes.
Comment ça marche ?
Le fonds FIVP permet non seulement d'indemniser les salariés et travailleurs agricoles, mais aussi les retraités agricoles (exploitants, conjoints et membres de la famille) qui ont cessé leur activité avant le 1er avril 2002, ainsi que les enfants ayant développé une pathologie en lien avec l'exposition de leurs parents aux pesticides in utero.
Pour les salariés indemnisés rien ne change puisque le montant des prestations versées est équivalent à celui qui était jusqu'ici attribué par le régime général ou agricole. En revanche, le fonds attribue une compensation complémentaire pour améliorer la prise en charge des non-salariés. En fonction du taux d'incapacité permanente de la victime (IPP), l'indemnisation sera effectuée sous forme de capital (IPP entre 1 et 9 %) ou sous forme de rente (à partir de 10 % d'IPP).
Pour en bénéficier, vous devez déposer une demande de reconnaissance de maladie professionnelle liée aux pesticides auprès de votre caisse d'affiliation (Cpam, MSA, CGSS) qui se chargera de la transmettre au FIVP. Seuls les dossiers concernant les enfants exposés de façon prénatale sont à enregistrer directement auprès du fonds.
Retrouvez plus d'infos sur le site internet officiel : Fonds-indemnisation-pesticides.fr et au 0 800 08 43 26 (numéro vert gratuit).