S'il est relativement méconnu du grand public, le mariage posthume est une pratique plus courante et ancienne qu'il n'y paraît. Tour d'horizon d'une démarche atypique et complexe.
Nous connaissons tous la célèbre formule « jusqu'à ce que la mort nous sépare ». Il n'est malheureusement pas rare, aussi tragique que cela puisse paraître, qu'un mariage se voit annulé à la suite du décès prématuré d'un des conjoints, à quelques semaines de la finalisation de la procédure. Certains survivants décident pourtant d'aller au-devant de cette sinistre fatalité en optant pour un mariage posthume.
Petite histoire de l'amour post-mortem
Instaurée par la loi du 17 mars 1803, cette démarche a connu de nombreuses modifications, compte tenu du contexte chaotique du début du xxe siècle. S'il se présente comme une particularité propre au droit français, le mariage posthume était fort courant en Allemagne durant la Première et la Seconde guerre mondiale. Il avait pour but de permettre aux femmes ayant perdu leurs compagnons sur le front de bénéficier d'une pension et d'offrir une légitimité aux enfants conçus avant leur trépas. Au début des années 60, le texte de loi a fait l'objet d'une importante rénovation suite à l'affaire du barrage de Malpasset, près de Fréjus, dont la rupture a causé la mort de 423 personnes. Parmi les victimes se trouvait un jeune homme qui aurait dû se marier quinze jours plus tard. Le désarroi de sa compagne, enceinte du défunt, a bouleversé l'opinion publique et contribué à une refonte de l'article.
Principe et formalités
Le mariage posthume est actuellement défini par l'article 171 du Code civil et reste une procédure exceptionnelle. Celle-ci passe par de nombreuses étapes, destinées à prouver le consentement sans réserve du défunt. Ces preuves doivent être transmises au Président de la République, chargé de valider la demande par décret. Son approbation est indispensable et nécessite la réunion de plusieurs documents. En cas d'acceptation, l'acte de mariage est daté du jour précédant la mort du fiancé.
Le conjoint survivant doit tout d'abord fournir des preuves attestant d'un véritable projet matrimonial. Il peut s'agir de documents très officiels comme un dossier de mariage ou un contrat établi par un notaire, mais aussi d'alliances, d'une réservation de salle pour la cérémonie ou même du justificatif d'achat d'une robe de mariée. Avant 2011, il fallait également montrer la publication des bans ou, à défaut, un certificat prénuptial datant de moins de trois mois. La procédure, jugée trop restrictive, a cependant été assouplie.
Avantages et limites
Il n'empêche, le mariage posthume reste une démarche longue et éprouvante. Si l'on peut le percevoir comme un acte romantique, il permet avant tout au survivant de bénéficier des avantages d'une personne mariée : attribution du nom du défunt conjoint à l'épouse, ouverture des droits liés au statut de veuf ou de veuve, obtention d'une pension de réversion ou d'une assurance veuvage. Toutefois, il importe de noter que cette démarche n'entraîne aucun droit de succession patrimoniale, contrairement aux mariages classiques.