Santé mentale des enfants, une urgence nationale - Minizap Grenoble
Santé

Santé mentale des enfants, une urgence nationale

Parce que les plus jeunes, en particulier les adolescents, sont les premiers à subir de plein fouet les troubles psychiques, il est primordial de savoir les repérer, et surtout, de bien les prendre en charge. Rencontre avec Pierre Nantas, psychothérapeute spécialiste de la question.

Avec 1 personne sur 5 touchée chaque année par un trouble psychique, soit 13 millions d'individus en France, la santé mentale doit être au cœur de toutes les préoccupations, au point que le gouvernement a décidé d'en faire sa grande cause nationale en 2025. D'autant que les pathologies psychiatriques concernent davantage les plus jeunes. Selon le dernier bulletin de Ramsay Santé (septembre 2024), 75 % des troubles mentaux surviennent avant l'âge de 25 ans et impactent 1 enfant sur 6. Automutilation, suicide, échec scolaire, violences, vie affective perturbée… les répercussions de ces troubles sont graves et bien souvent sous-estimées. Il existe pourtant des mécanismes de prise en charge efficaces, à condition de bien les connaître. On fait le point sur la question avec Pierre Nantas, auteur et psychothérapeute.

Quels troubles psychologiques touchent le plus les enfants et adolescents ?

On a d'abord les troubles anxieux qui sont caractérisés par un état de peur, d'inquiétude ou de terreur affectant grandement la capacité de l'enfant à se conduire normalement. La tristesse, l'anxiété, les difficultés liées au sommeil, l'arrêt brusque des activités et la perte de l'élan vital sont des signaux forts. Mais il existe d'autres alertes telles que les phobies spécifiques, qui sont des peurs intenses et déraisonnables et les troubles paniques qui induisent des crises de panique récidivantes et fréquentes (au moins une fois par semaine). De même, l'anxiété de séparation se caractérise par une peur persistante, intense et inappropriée de la séparation d'une des principales figures d'attachement (habituellement la mère), tandis que le trouble d'anxiété sociale est une peur persistante du ridicule ou d'humiliation dans un contexte social, notamment à l'école.

Qui sont les plus touchés : les enfants ou les adolescents et les filles ou les garçons ?

La santé mentale est plus impactée chez les adolescents (13-18 ans) que chez les enfants (9-12 ans), et également plus impactée chez les filles que chez les garçons.

Pourquoi y a-t-il une recrudescence de ces troubles chez les plus jeunes aujourd'hui ?

Le professeur David Cohen, chef du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital de la Pitié Salpêtrière, à Paris, a récemment confié à la Fondation pour la recherche médicale les raisons de ce phénomène. « Il se traduit à la fois par une augmentation des consultations de psychiatrie et par l'apparition de problématiques nouvelles, facteurs de cette dégradation de la santé mentale : adhésion à des conduites de radicalisation dans tous types d'idéologie ; questionnements sur l'identité de genre, notamment chez les jeunes adolescentes ; pratique des réseaux sociaux et harcèlement et, enfin, anxiété écologique, avec une jeunesse qui a des difficultés à se projeter dans des trajectoires de vie. »

Quels sont les signes et symptômes qui doivent alerter ?

Il peut paraître parfois difficile de déchiffrer l'état mental d'un jeune, particulièrement chez les adolescents. Cependant, certains symptômes doivent interpeller les parents ou les enseignants : lorsqu'un adolescent ou un enfant à la personnalité joyeuse et énergique devient irritable ou négatif, se renferme sur lui-même, adopte des comportements d'évitement ou montre des problèmes de sommeil, c'est que quelque chose ne va pas. Les troubles du comportement alimentaire (9 filles pour 1 garçon) ou l'apparition d'addictions (cannabis, alcoolisation excessive, cyberaddiction, jeux en ligne…) sont également des symptômes révélateurs.

Quels sont les impacts de ces troubles sur la scolarité, puis à l'âge adulte ?

Les traumatismes vécus pendant l'enfance et les troubles psychiques qui en découlent peuvent induire une perte de confiance en soi, dans les autres et en l'avenir. Il s'ensuit une difficulté à s'engager dans une activité physique continue, à entreprendre et s'investir dans un métier et à développer et entretenir des relations sociales et familiales épanouissantes. On entre dans un univers où plus rien n'est sûr.

Qu'est-ce qu'il manque en France dans la prise en charge des troubles psychiques chez les jeunes ?

Mieux former les professionnels de santé mentale aux nouvelles pathologies, et notamment celles qui sont induites par la société actuelle. Il faut donner aux médecins généralistes les moyens de diagnostiquer les différentes formes de souffrances psychiques et de prendre le temps d'apporter une réponse adaptée qui ne soit pas seulement médicamenteuse. Enfin, il faut donner aux enseignants, de la maternelle jusqu'au lycée, les moyens de pouvoir accomplir leur mission dans les meilleures conditions possibles.

Quels conseils donneriez-vous à des jeunes en souffrance ? Et aux parents ?

Ne pas rester seuls ! Faites-vous aider par des professionnels, et surtout, évitez de vous confier sur les réseaux sociaux. Pour les parents, pensez aux conséquences de vos actes d'adultes sur l'équilibre de vos enfants. Ne leur laissez pas la responsabilité de vous prendre en charge. Chaque fois que c'est possible, pensez à vous faire aider par un psychologue spécialisé avant de recourir à la médication.

À qui les jeunes et les parents peuvent-ils s'adresser en cas de besoin ?

Enfant ou adolescent peuvent parler et échanger au 0800 235 236, tous les jours de 9h à 23h, c'est anonyme et gratuit. Ils peuvent aussi trouver des infos sur des sujets comme l'isolement, le stress, l'inquiétude face à l'avenir et les relations avec les autres sur le site Filsantejeunes.com.
Un accompagnement psychologique est proposé aux jeunes qui en ressentent le besoin. Il existe deux grands dispositifs : « Santé psy étudiants », pour les étudiants qui peuvent bénéficier de 12 séances gratuites chez un psychologue, sans avance de frais. Et « Mon soutien psy » qui permet à tout adolescent ou adulte de bénéficier de séances d'accompagnement psychologique avec une prise en charge par l'Assurance maladie.
Les personnes qui souffrent du trouble de la personnalité borderline et leurs proches (conjoints et famille) peuvent également faire appel aux conseils de l'Aforpel, première association francophone spécialisée dans la formation et l'information sur le trouble de l'état limite.

Propos recueillis par Marina Knittel
Photos liées à l'article
© iStock / City Presse
© iStock / City Presse
Santé

Une nouvelle plateforme d'information dédiée aux hommes

En plus de proposer à tout un chacun un diagnostic, des téléconsultations ainsi qu'un suivi personnalisé, tout ceci à distance grâce à son site internet, la plateforme digitale Charles.co dispose également d'un blog abordant diffé...
Lire la suite
Une nouvelle plateforme d'information dédiée aux hommes
Santé

Des médicaments périmés encore efficaces

" Prendre un médicament périmé, c'est juste courir le risque qu'il soit légèrement moins efficace " martèle le journaliste Pierre Thieulin-Pardo dans une récente vidéo de l'UFC Que Choisir. En effet, selon une nouvelle enquête de ...
Lire la suite
Des médicaments périmés encore efficaces
Santé

Adolescents : quelle prise en charge ?

L'adolescence est une période de transition qui s'accompagne de nombreux changements tant sur le plan physique que psychologique. C'est pourquoi l'Assurance maladie permet un suivi de santé et une prise en charge avec des modalité...
Lire la suite
Adolescents : quelle prise en charge ?