Les parlementaires américains partis en croisade contre les géants du numérique que sont Google, Apple, Amazon ou encore Facebook, viennent de rendre leur rapport à la Chambre des représentants. Le texte de 449 pages est implacable avec les GAFA.
Le combat contre le monopole des GAFA, acronyme désignant les grands noms de l'internet comme Google, Apple, Facebook ou encore Amazon, ne se déroule pas qu'en Europe. Le Vieux Continent a fait de l'imposition de ces entreprises tentaculaires un des enjeux majeurs de ces dernières années, mais le débat fait aussi rage aux États-Unis, pourtant berceau de ces géants du numérique. La fronde gronde. Les frasques d'Epic Games contre Apple ne sont que la partie la plus retentissante d'un combat titanesque. Le studio créateur du célèbre jeu Fortnite s'est en effet vu interdire l'accès à l'AppStore après avoir mis en place un système de paiement alternatif permettant de contourner la commission de 30 % prise par la Pomme sur chaque transaction effectuée via son magasin d'applications. C'est sur le plan législatif que la bataille fait rage. Depuis seize mois, les parlementaires du sous-comité antitrust de la Chambre des représentants enquêtent sur les risques de monopole engendrés par la mainmise de ces mastodontes omniprésents et préparent des propositions de mesures afin de mettre fin à leur domination sans partage.
Un rapport au vitriol
Leur rapport vient de tomber. Lourd de 449 pages, le document ne retient pas ses coups. « Ces géants qui étaient autrefois des petites start-up, remettant en question le statu quo, sont devenus le genre de monopoles que nous n'avions pas vus depuis l'ère des barons du pétrole et des magnats des chemins de fer », résument les élus. Pour eux, il est urgent de casser ces trusts afin d'assainir un environnement qui est devenu anticoncurrentiel et qui bride à la fois l'innovation et la croissance. Les auteurs, issus du camp démocrate, ont voulu proposer un « Glass-Steagall de l'internet ». Cette loi de 1930, née dans les ruines du krach de 1929, obligea les banques de dépôts à se séparer de leurs activités d'investissement. Le rapport estime que les entreprises dominant les activités numériques profitent de manière inéquitable de leur position d'intermédiaires. Leurs concurrents sont en effet à la fois obligés d'utiliser leurs solutions, comme Android ou iOS, et de lutter contre leurs services, comme Apple Music ou Google Shopping, qui eux, profitent de l'exposition offerte par leur maison-mère.
Casser le monopole
Les représentants mettent en avant un lot de mesures drastiques. Dans un premier temps, les GAFA devraient céder ou cloisonner de manière hermétique leurs différentes activités. Pour Google, par exemple, cela signifierait de ne plus contrôler le système d'exploitation Android. Facebook devrait céder Instagram et WhatsApp ; Amazon ne pourrait plus vendre ses propres produits sur sa plateforme et Apple devrait choisir entre l'AppStore et ses services maison. Ensuite, les entreprises seraient dans l'impossibilité d'enfermer leurs utilisateurs dans leur écosystème. Pour le réseau social, par exemple, cela entraînerait l'ouverture des données à des concurrents. Dans le viseur des propositions de loi également, la politique de rachat agressive de ces sociétés. Le rapport montre que les géants du web ont avalé plus de 500 entreprises ces dernières années sans que le régulateur ne trouve à y redire. Si le rapport se transformait en législation, l'acheteur devrait prouver que son rachat ne nuit pas à la concurrence. Dans le camp républicain, les propositions ont été jugées « radicales, remodelant le droit de la concurrence selon l'agenda de l'extrême gauche », comme l'a expliqué le sénateur Jim Jordan dans une lettre. Le débat sera au cœur des enjeux de la prochaine présidentielle américaine. Les résultats de l'élection de novembre, qui pourraient voir déferler une vague démocrate si Donald Trump ne remporte pas un second mandat, pourraient avoir de lourdes conséquences pour les GAFA.