La crise sanitaire a suspendu la procédure de mise aux enchères des fréquences 5G initialement prévue pour avril dernier. Bouygues Telecom souhaitait que ce report renvoie l'échéance à la fin de l'année ou au début 2021. Il n'en sera rien. L'attribution aura lieu en septembre et la 5G sera déployée dans la foulée. Toutes les interrogations ne sont pourtant pas encore levées.
La crise sanitaire a donné un coup d'arrêt au déploiement de la 5G en France. L'attribution des fréquences aux grands opérateurs devait en effet avoir lieu le 21 avril dernier. Le virus et le confinement en ont décidé autrement. Maintenant que les dernières restrictions sont en passe d'être levées, l'heure de la mise aux enchères a sonné. Les acteurs auront du 20 au 30 septembre pour déposer leurs offres. Cette étape marquera le début du déploiement effectif de la technologie dans l'Hexagone.
À toute vitesse
Dans un premier temps, ce sont les fréquences comprises entre 3,4 et 3,8 GHz qui ont été retenues. Pour mémoire, la 4G transite en dessous de 1 GHz. Ce ne sont pas des plages optimales pour la technologie, mais elles permettent aux opérateurs d'offrir un réseau solide. En attendant le déploiement sur des ondes de 20 à 35 GHz, les débits vont tout de même être multipliés par 10 par rapport à la 4G pour atteindre environ 10 Gbits/s. C'est déjà mieux que la fibre. Dans l'opération, la latence (le temps de réponse entre l'émetteur et le récepteur) est réduite à néant et le nombre d'appareils que le réseau peut gérer simultanément est multiplié par 100. Téléprésence, réalité virtuelle ou augmentée, ville intelligente, voiture autonome... l'horizon des possibles est vaste. Le monde compte aujourd'hui environ 25 milliards d'objets connectés. Il y en aura le double en 2030. Chaque Français disposant d'un forfait internet mobile consomme actuellement en moyenne 9 Go de données par mois. Les experts en télécommunications estiment que la consommation sera multipliée par cinq en 2025. La 4G n'aurait pas pu suivre. En outre, en utilisant les fréquences réservées aujourd'hui au Wimax, ces ondes qui permettent de couvrir les zones blanches, la 5G pourrait signer la disparition de celles-ci. Sans oublier le fait que les débits étant plus intéressants que ceux de la fibre, certains utilisateurs se passeront certainement d'un abonnement fixe. Les promesses sont nombreuses... en tout cas sur le papier.
Questions existentielles
Avec la 5G, les réseaux seront plus performants et les technologies pourront s'appuyer sur une infrastructure inédite. Les questions de la préservation de la vie privée et de la surveillance de masse se poseront de manière encore plus pressante. La crise sanitaire a aussi révélé la grande défiance d'une certaine partie de la population pour cette nouvelle technologie. Propagées sur les réseaux sociaux par des personnalités médiatiques, certaines idées sur la nocivité des ondes ont fait leur chemin. Certains sont allés jusqu'à affirmer que les antennes 5G avaient répandu le coronavirus à Wuhan alors que le réseau n'y est pas encore entièrement déployé. Au-delà des craintes irrationnelles, les acteurs de la 5G vont devoir rassurer et multiplier les études sérieuses – la crise sanitaire ayant montré combien cette denrée était rare. Dans le cas contraire, les actes de vandalisme commis ces dernières semaines vont se multiplier. Enfin, une question reste toujours en suspens : avec qui déployer la 5G ? Free a déjà signé avec Nokia, mais Huawei, l'un des grands spécialistes du domaine, a été déclaré persona non grata à cause de sa trop grande proximité avec les services de renseignements chinois. Or, Bouygues et SFR collaborent déjà avec le fabricant pour la 3G et la 4G. Les opérateurs sont donc dans l'attente d'un éclaircissement de la part des autorités françaises. Huawei étant plus compétitif que ses concurrents, le coût et la durée du déploiement de la 5G en France dépendront en partie de l'évolution de la guerre commerciale entre la Chine et les pays occidentaux. La route est encore longue, mais la transition de la 4G vers la 5G s'annonce passionnante.
