Face à l'ampleur de la pandémie du coronavirus, l'intelligence artificielle montre enfin sa véritable force. Dépistage, surveillance, création de médicaments... les algorithmes sont sur tous les fronts.
Le 13 février dernier, la société CloudMinds Technology livrait aux hôpitaux chinois de Wuhan et de Shanghai, en pleine crise sanitaire, plusieurs robots intelligents. Les algorithmes de ces androïdes passent au peigne fin des millions d'informations médicales pour apporter leur soutien aux patients, en leur donnant les bons médicaments, en leur prenant la température ou en répondant à leurs questions, par exemple. Ils sont également capables de désinfecter les salles. Dans un communiqué, Bill Huang, le PDG de CloudMinds Technology a déclaré que ses créations « peuvent agir à la place des équipes médicales dans les zones de quarantaine, et réaliser des tâches simples de suivi, ce qui réduit les risques d'exposition ».
Nouvel allié
Par rapport aux précédentes épidémies, comme celle du Sras de 2003, les scientifiques disposent ainsi d'un nouveau soutien de poids : l'intelligence artificielle (IA) et son incomparable faculté à rapprocher des données. Selon le journal économique Nikkei Asian Review, le géant chinois de la distribution Alibaba, l'équivalent local d'Amazon, a déjà développé un algorithme capable de diagnostiquer le coronavirus Covid-19 en quelques secondes (contre 15 mn auparavant) avec un taux de réussite de 96 %. BlueDot, une firme canadienne spécialisée dans l'IA, a fait les gros titres en prédisant le risque pandémique grave quelques jours avant les grandes organisations mondiales de la santé. Le programme que l'entreprise a développé recense des milliers d'actualités, analyse d'innombrables rapports médicaux en 65 langues, et prend en compte les flux de population, notamment à travers les billets d'avion vendus. L'IA de BlueDot est capable de modéliser la propagation du virus, information capitale afin de contenir la pandémie. Les chercheurs de la NorthEastern University de Boston, aux États-Unis également, sont allés jusqu'à développer un modèle prédictif baptisé EpiRisk. Ce dernier évalue les risques de dissémination à partir des chiffres du transport aérien et des déplacements journaliers des populations des habitants de 78 000 régions dans le monde entier. C'est ce programme qui a vu, par exemple, que l'Espagne serait touchée avant la France par la contamination venue d'Italie.
Accélérer la recherche
Détecter les malades et prédire la propagation de l'épidémie, c'est bien. Venir en aide aux médecins et aux chercheurs, c'est mieux. Fin janvier, l'algorithme d'InferVision, spécialisé à l'origine dans le dépistage du cancer, a été mis à jour. En une petite minute, le code est capable de reconnaître les lésions caractéristiques du coronavirus sur des images médicales (radios, scanners, IRM, etc.). Les médecins gagnent un temps précieux dans l'analyse des clichés et peuvent ainsi prendre rapidement des décisions de mise en quarantaine, d'intervention ou de soins. Enfin, l'intelligence artificielle permet aussi d'accélérer la recherche de traitements. Associée à l'Imperial College de Londres, la start-up anglaise BenevolentAI, a confronté la structure chimique du virus à un grand nombre de molécules connues afin de découvrir celles qui auraient des effets. Le barictinib, un remède contre l'arthrite rhumatoïde, a ainsi été identifié comme capable de bloquer l'infection des poumons par le coronavirus. Mieux, la société Insilico Medicine, a programmé une IA capable d'imaginer des molécules mortelles pour le virus. Plus de 100 000 d'entre elles ont été passées au crible. Quelque 100 ont été retenues par le programme avant que leur liste ne soit publiée pour recueillir l'avis de la communauté scientifique. Sept produits prometteurs seront synthétisés dans les prochaines semaines. L'IA semble enfin tenir ses promesses.