De nombreux départements français réglementent la cueillette des jonquilles sauvages afin d'en préserver les populations. Est-ce à dire qu'il vaut mieux éviter de cueillir celles du jardin si l'on veut qu'elles repoussent chaque année ? Pas du tout ! À condition cependant de ne pas s'y prendre n'importe comment.
Dans les bois, la jonquille a la mauvaise idée de fleurir avant tout le monde, ce qui la rend très attractive pour la constitution des premiers bouquets de printemps. Dans le jardin, c'est à peu près la même chose. Alors, vaut-il mieux l'avoir en vase dans la maison ou en gerbe dans le jardin ? Les deux, évidemment !
L'un des premiers bouquets de l'année
La jonquille sauvage (Narcissus pseudonarcissus L.) est une espèce endémique de narcisse qui pousse spontanément dans de nombreuses régions françaises. Plante bulbeuse à floraison jaune vif précoce, capable de tapisser des sous-bois entiers, elle a toujours fait l'objet de cueillettes sauvages tolérées. Il est vrai que ses fleurs permettent de constituer d'éclatants bouquets parfumés, à l'heure où les floraisons sont encore rares dans la nature. Incontournables musts de fin d'hiver, les bouquets de jonquilles vendus à tour de bras chez les fleuristes sont évidemment issus de cultures qui n'impactent pas les populations sauvages.
Grosse pression
En revanche, la cueillette du dimanche, qu'elle soit le fait de promeneurs occasionnels ou de cueilleurs habitués et aguerris, pose des problèmes de surfréquentation des massifs, de dérangement de la faune, de préservation des biotopes et bien évidemment de l'espèce. En premier lieu, le piétinement répété contribue au tassement des sols, ce qui, à terme, favorise la disparition des jonquilles dont le bulbe a tendance à pourrir dans les terres compactes. Depuis une vingtaine d'années, de nombreux départements où la jonquille pousse à l'état sauvage ont donc été contraints de légiférer, à la fois pour limiter la fréquentation et les prélèvements. La plupart des arrêtés fixent un nombre maximal de tiges à prélever, qui se résume le plus souvent à une dizaine de tiges fleuries par jour, ou parfois, de manière plus administrative, à « une quantité de spécimens limitée à celle que peut contenir la main d'une personne adulte ».
Même pas peur !
Paradoxalement, en elle-même, la cueillette des fleurs de jonquille ne présente pas un danger direct pour la survie de l'espèce car celle-ci se propage essentiellement par reproduction asexuée, en l'occurrence grâce à la multiplication de bulbilles autour du pied mère. Certes, ce mode de reproduction favorise la multiplication clonale, réduisant de fait le brassage génétique que permet le croisement par pollinisation. Mais c'est là un phénomène courant que la nature sait parfaitement gérer. On peut donc prélever la fleur sans menacer le renouvellement des populations, y compris dans le jardin.
Le B.A.-BA
Cela dit, au moment de la cueillette, il est important d'appliquer quelques principes qui éviteront à la plante de péricliter dans votre jardin. La plupart des arrêtés préfectoraux reprennent d'ailleurs ces règles d'or : laissez en place feuilles et bulbes, en ne prélevant que la hampe florale. En fin de cycle, laissez les feuilles faner naturellement sur pied jusqu'au jaunissement complet car c'est un moment essentiel durant lequel le bulbe se régénère.