Les vivaces éphémères n'ont pas la longévité habituelle des plantes vivaces. Heureusement, on peut les multiplier facilement par semis pour les remplacer après leurs bons et loyaux services. On les sème alors comme des plantes bisannuelles avant le début de l'été, pour une première floraison au printemps suivant.
Pour un jardinier lettré, aucune hésitation, une « vivace éphémère », c'est avant tout un oxymore, au même titre que « cette obscure clarté qui tombe des étoiles » ou « les soleils mouillés de ces ciels brouillés ». Rappelons que l'oxymore est une figure de style qui permet de créer un effet inattendu dans un texte en rapprochant deux termes contradictoires. Les vivaces éphémères en feraient-elles de même au jardin ? Peut-être !
Le classicisme de la vivace
À l'inverse de la plante annuelle, qui ne vit qu'un an, ou de la bisannuelle qui meurt au bout de deux ans, une plante vivace est pérenne. Si elle disparaît de la surface du sol durant l'hiver après avoir fané, c'est pour mieux réapparaître au printemps et prendre de l'ampleur d'années en années. Mais l'inconvénient de cette marathonienne de la fleur, c'est que son développement juvénile, depuis le semis jusqu'à la première floraison, prend plusieurs années. C'est pourquoi on l'achète surtout en godet, déjà mature et prête à fleurir.
Une vivace pressée
La vivace éphémère a un tout autre rapport au temps. Étant généralement originaire de milieux secs où la survie peut être compromise par le moindre imprévu, sa stratégie est de se développer rapidement. Elle doit fleurir et faire des graines afin d'assurer la pérennité de l'espèce le plus vite possible. Aussi est-elle capable d'émettre ses fleurs une fois le premier hiver enduré, c'est-à-dire avant même parfois la fin de sa première année d'existence. Cependant, cette rapidité de développement, sans doute très énergivore, a un coût, celui d'une existence « éphémère ». Au bout de trois à cinq ans d'épuisant labeur, la souche meurt.
Semis facile
Rose-tremière, monnaie du Pape, myosotis, muflier, giroflée (ravenelle ou d'hiver), julienne des dames, œillet du poète, pâquerette… les vivaces éphémères sont plus répandues qu'on pourrait le croire. Au jardin, elles cachent leur faible durée de vie par une propension à se ressemer facilement, donnant l'illusion de la pérennité. Selon les espèces, de la mi-mai à la fin juin, dans un sol bien réchauffé, il est facile de procéder au semis de ces vivaces à floraison rapide, afin de regarnir les massifs à moindre coût. En caissettes ou en godets individuels, l'opération est simple, mais réclame un suivi attentif de l'arrosage durant l'été qui suit. Les plants sont repiqués à leur emplacement définitif à l'automne.
Deux années en une seule
On dit à raison qu'on sème ces vivaces comme des bisannuelles. Effectivement, après les semis de fin de printemps, les plants ont le temps de se constituer durant l'été une solide petite touffe de feuilles bien enracinée, capable de résister à l'hiver. Dès le redoux printanier ils reprennent leur croissance avant de fleurir dans le cours de cette seconde saison, comme une bisannuelle. Attention, les semis tardifs d'été, qui ont moins de temps pour se développer, donnent des plants plus chétifs et moins rustiques dont la survie hivernale est plus aléatoire.