Après le temps des fleurs vient celui des graines, et pour les disséminer le mieux possible, les plantes ont mis au point différentes stratégies. La plus spectaculaire d'entre elles est sans conteste la ballochorie, une technique pour le moins explosive qui lance les semences à l'assaut de nouveaux territoires.
Pour la graine, tous les moyens sont bons pour se répandre, à commencer par le recours à des agents propagateurs : le vent (anémochorie), les animaux (zoochorie), l'eau (hydrochorie) ou tout simplement la gravité (barochorie). Plus fort encore, avec la ballochorie, la graine se catapulte, vers l'infini et au-delà !
Se propager pour survivre
La dissémination des semences est pour les plantes une question de survie, car elle permet d'assurer la perpétuation des espèces. Celle-ci aura d'autant plus de chances d'être efficiente que les graines seront envoyées loin du pied mère. C'est là une manière de conquérir de nouveaux territoires et de fonder de nouvelles colonies, de se croiser avec d'autres individus et d'assurer ainsi un brassage génétique bénéfique, ou encore de limiter la concurrence auprès du pied mère en éparpillant les graines sur une large surface.
Boum !
À ce petit jeu, la ballochorie ou bolochorie (du grec « ballein », qui veut dire « jeter, lancer » et « khorein » qui signifie « se mouvoir ») est un procédé ingénieux qui permet à la plante de propulser ses graines par le biais d'une explosion. C'est généralement le résultat d'une montée en pression à l'intérieur de l'organe qui contient les semences (fruit, capsule, gousse…). Le cas le plus retentissant de ce mode de dissémination est le sablier (Hura cretitans), un arbre tropical qui expulse les graines contenues dans ses gros fruits juteux arrivés à maturité en explosant violemment. Les semences sont alors expulsées à plus de 200 km/h, jusqu'à une trentaine de mètres à la ronde !
Explosions sauvages
Sans atteindre de telles déflagrations, nombreuses sont les plantes sauvages à avoir adopté ce procédé, à commencer par l'Ecballium elaterium, le concombre d'âne, qu'il ne faut pas chatouiller de trop près à la fin de l'été si l'on ne veut pas vivre une expérience poisseuse. Au moindre frottement, ses fruits turgescents explosent en se détachant brutalement du pédoncule, dans un jet visqueux qui mélange les graines et la pulpe liquéfiée. Ainsi font aussi, mais plus proprement, la cardamine hérissée, le bec-de-grue, la grande chélidoine, les genêts à balais ou d'Espagne ou l'oxalis corniculée.
Et dans le jardin ?
Dans ce feu d'artifice de semences, le jardin n'est pas en reste. Du crépitement feutré des inflorescences d'euphorbe à l'explosion sans sommation des gousses de bignone et de glycine, en passant par le catapultage discret des graines de violette odorante, il y en a pour tous les goûts, sans parler de l'acanthe, de certaines espèces de lupins ou d'impatiences.
Une redoutable efficacité
Cette propension à l'explosion explique la facilité de ces plantes à se propager rapidement, les grimpantes étant, du fait de la hauteur, celles qui se disséminent le plus loin. Il faut absolument veiller à arracher régulièrement tous les jeunes plants parachutés dans les alentours du pied mère avant qu'ils ne s'enracinent en profondeur et n'envahissent le jardin durablement.