Il n'est pas très difficile de cultiver le thé du Paraguay, un petit arbuste dont le feuillage sert à la préparation du célèbre maté, cette boisson chaude tant prisée des Sud-Américains. À ceci près qu'il faut pour cela apprendre à cultiver du houx. Car c'est bien de cette espèce dont est issue la yerba maté, l'herbe à maté.
Pour faire la révolution, il a fallu à Ernesto Guevara, alias le Che, un courage à toute épreuve, une doctrine chevillée au corps, quelques pistolets bien sûr, mais surtout des litres et des litres de maté. Car en bon Argentin qui se respecte, le Comandante était accro à cette boisson énergisante. Hasta la victoria siempre !
Le maté, c'est la troisième boisson chaude caféinée consommée dans le monde après le thé et le café. Très prisé en Amérique du Sud où il est une véritable institution populaire, on le consomme seul ou en groupe, à toute heure du jour. On le verse dans une calabaza curada, un petit récipient creusé dans une calebasse ronde, et on le boit à l'aide d'une bombilla, une paille en métal à l'extrémité aplatie et trouée, qui évite d'avaler les feuilles. Traditionnellement, les gauchos ont pour coutume de boire le maté en assemblée, en faisant circuler un seul et unique récipient au sein du groupe assis en rond. Laxative, diurétique, antioxydante, énergisante et somnivore (qui empêche le sommeil), la boisson revêt donc également une très forte symbolique de sociabilité.
Houx-thé, Papa, houx-thé !
À la base de cette boisson mythique, il y a le thé du Paraguay (Ilex paraguensis), un arbuste qui porte mal son nom puisqu'il s'agit en réalité d'une espèce de houx. Contrairement à notre houx national (Ilex aquifolium), il n'est évidemment pas toxique et ses feuilles persistantes ne sont ni piquantes ni coriaces. À l'état naturel, il peut atteindre une vingtaine de mètres de hauteur et sa croissance est rapide, mais en arboriculture intensive, sa hauteur est limitée par la taille à quatre ou cinq mètres seulement. Sous nos climats, et a fortiori lorsqu'on le cultive en pot, il pousse doucement et dépasse rarement les deux mètres de haut.
Un profil acidophile
Puisqu'on a affaire à un houx, il faut cultiver le thé du Paraguay comme un houx. Comme les plantes acidophiles de type camélias, il affectionne les emplacements mi-ombragés et les sols humifères à tendance neutre ou acide qui ne doivent jamais se départir d'une légère humidité résiduelle. Il n'apprécie pas du tout les sols argileux ou alcalins, pas plus que les arrosages réguliers à l'eau calcaire car tous induisent des chloroses qui font jaunir le feuillage. Enfin, le thé du Paraguay est une espèce subtropicale dont la rusticité (-8 °C) est relative. Voilà pourquoi il est généralement préférable de le cultiver dans un pot que l'on pourra hiverner à l'abri et sortir aux beaux jours.
Quand tout va bien pour lui, le thé du Paraguay fleurit en mai/juin sous la forme de petites fleurs blanches qui naissent à l'aisselle des feuilles. Cette floraison, relativement insignifiante, produit par la suite des petits fruits rouges non comestibles qui mûrissent durant l'été. Leur apparition sonne l'heure de la récolte des feuilles. Afin de ne pas épuiser l'arbuste, on ne prélève pas plus du tiers du feuillage. Les feuilles sont ensuite mises à sécher puis broyées pour être consommées directement (maté vert), après une maturation de plusieurs mois (maté affiné), ou après torréfaction (maté torréfié).
Une préparation quasi rituelle
La préparation traditionnelle du maté exige du savoir-faire car il faut placer la yerba maté en oblique dans la tasse et bien positionner la bombilla. La consommation avec une boule à thé est sans doute un sacrilège, mais... bien plus simple.