Depuis le Moyen Âge, l'État permet aux usagers résidant à proximité des bois et forêts de profiter de leurs ressources pour se chauffer sous certaines conditions à travers l'affouage. Zoom sur un droit méconnu.
Si le bois arrive en tête des combustibles les moins chers du marché pour se chauffer, il a lui aussi subi d'importantes hausses de prix qui s'ajoutent à toutes les dépenses incontournables des ménages. Alors que la chasse aux bons plans bat son plein, c'est l'occasion de mettre en lumière un droit méconnu et pourtant séculaire permettant de prélever dans la forêt le bois nécessaire pour se chauffer. C'est ce qu'on appelle l'affouage.
Une tradition ancestrale
Ce terme est issu du verbe « affouer », qui signifie « allumer » en ancien français. Comme le définit le Larousse, il s'agit d'un « droit qu'ont les habitants d'une commune de pratiquer certaines coupes de bois sur les biens communaux ; la part de chacun ». Cette pratique remonte au Moyen Âge, lorsque le seigneur accordait aux habitants le droit de récolter du bois de chauffage dans ses forêts. Or, cette tradition existe toujours aujourd'hui, bien qu'elle soit très encadrée !
En effet, l'affouage est interdit dans les forêts domaniales, autrement dit celles qui appartiennent à l'État. En revanche, cette pratique est perpétuée dans les bois communaux qui font donc partie du domaine privé d'une municipalité. Pour autant, il ne s'agit pas de laisser n'importe qui aller réaliser n'importe quelle coupe.
Des règles strictes
De nos jours, l'affouage est organisé par le conseil municipal qui en détermine les modalités. Une condition d'ancienneté d'installation dans la commune peut notamment être prévue, sans excéder six mois. Des lots d'arbres sont ensuite établis et répartis par tirage au sort, avant d'être exploités par les habitants bénéficiaires (dits affouagistes) ou par la commune qui leur délivrera les coupes réalisées. En outre, une taxe d'affouage, en général modique, peut être mise en place par la municipalité en compensation du lot octroyé.
Bien entendu, ces prélèvements doivent se faire dans le cadre de la gestion sylvicole. C'est pourquoi les arbres sont identifiés par les forestiers de l'Office national des forêts (ONF). Comme l'explique cet établissement public sur son site internet, « ils se trouvent généralement dans les jeunes peuplements à éclaircir et dans les taillis et leur diamètre ne dépasse pas 35 cm à hauteur d'homme ».
En France, un million de mètres cubes serait mis à disposition des collectivités pour l'affouage d'après l'ONF, sachant qu'on dénombre 14 000 forêts communales essentiellement présentes dans les régions Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté. Néanmoins, l'Office national précise que ce volume est en baisse régulière depuis dix ans ; cette pratique se perdant peu à peu.
Le mode d'emploi
S'improviser bûcheron pour obtenir son bois de chauffage n'est pas une mince affaire ! Outre le choix des essences à privilégier parmi le lot attribué (chêne, charme, hêtre, etc., en évitant les résineux qui encrassent la cheminée), cette opération est dangereuse et nécessite d'avoir un matériel de protection et un savoir-faire.
D'autre part, sachez qu'il s'écoule un an entre la coupe et son utilisation dans votre cheminée ou votre poêle. En effet, les affouagistes sont autorisés à exploiter le lot d'arbres qui leur a été attribué uniquement pendant l'hiver, en période hors sève. Il s'agit alors de réaliser des tronçons d'un mètre de long afin de les empiler en stères, l'unité de mesure du bois. Chaque stère mesure ainsi 1 mètre de large, sur 1 mètre de long et 1 mètre de haut. Mais attention, tout est laissé sur place ! Ce n'est qu'au cours de l'été suivant, après un temps de séchage naturel, que le bois sera transporté jusqu'au domicile des usagers.
Devenir affouagiste
Vous résidez près d'une forêt communale et vous souhaitez devenir affouagiste ? Les conditions varient selon les communes. Pour vous renseigner, vous pouvez contacter votre mairie ou la direction territoriale de l'ONF correspondant à votre région, dont les coordonnées sont disponibles sur Onf.fr.