Si la garantie des loyers impayés est aujourd'hui le moyen le plus courant d'assurer les arrières des bailleurs, ses critères parfois très stricts peuvent constituer un frein à l'accès au logement pour certains candidats à la location. Enquête.
Après de longs mois passés à l'étroit dans des logements exigus, bon nombre de Français ressentent le besoin de faire leurs cartons. Mais pour obtenir les clés de leur nouveau nid douillet, les candidats à la location doivent afficher une grande solidité financière. Car, plus encore que le bailleur ou son gestionnaire, c'est bien souvent l'assureur qu'il faut convaincre…
La GLI, incontournable
Lorsqu'on investit dans un bien immobilier pour financer, le plus souvent, ses vieux jours, ne pas se tromper dans le choix de son locataire est un impératif. En effet, « dans 9 cas sur 10, le bailleur a lui-même un emprunt à rembourser pour l'acquisition de ce bien locatif. Le moindre défaut de paiement peut donc le mettre en difficulté », explique Christine Fumagalli, présidente du réseau Orpi.
Dans le cas de petites surfaces louées à des étudiants, il est alors assez courant de sécuriser l'opération par la présence d'une caution (en général les parents) ou par la garantie publique Visale. Le reste du temps, c'est en revanche la garantie des loyers impayés, dite GLI, qui est largement privilégiée. Offrant une couverture très large, elle prend en charge les impayés de loyers, les dégradations locatives et même, parfois, la carence de location. Ce contrat constitue d'ailleurs un véritable argument pour obtenir l'emprunt immobilier nécessaire à l'achat du logement.
De plus, cette assurance privée est plus rassurante qu'une caution dont la situation financière peut évoluer dans le temps. Après tout, « on est toujours plus à l'aise lorsqu'on a la main sur ses garanties », nous confirme Julien Hue, responsable marketing assurances dommages à la Macif. D'autant que si « les impayés ne sont pas forcément fréquents, ils sont généralement très coûteux et longs à régler lorsqu'ils surviennent », rappelle l'assureur.
La solvabilité avant tout
Cette gestion assurantielle du risque impose, en contrepartie, une sélection rigoureuse des futurs occupants. « Pour pouvoir bénéficier d'une GLI, il faut que les propriétaires choisissent des locataires qui réunissent certaines conditions de solvabilité, notamment en termes de statut professionnel et de taux d'effort », expose la Maif. Lors d'une nouvelle entrée dans les lieux, cet assureur demande par exemple à ce que le montant du loyer n'excède par 33 % de la rémunération du locataire, mais peu importe que le candidat soit en CDI, CDD, intérimaire, retraité ou libéral. De son côté, la Matmut applique un taux d'effort de « 37 % ou de 33 % si le locataire est en contrat à durée déterminée, en intérim ou intermittent du spectacle », tandis que le seuil maximum est de 38 % chez Groupama. En revanche, lorsqu'il s'agit de souscrire une GLI pour un logement déjà loué, ces deux compagnies vérifient simplement qu'il n'y a pas eu d'incident de paiement dans les six derniers mois.
Un frein au logement
Certains contrats sont néanmoins tellement stricts qu'ils en deviennent un frein à la location, comme en témoigne Audrey Courault, directrice de l'agence Stéphane Plaza Immobilier Tours Ouest. « La GLI que nous proposions au départ à nos bailleurs exigeait un revenu trois fois supérieur au loyer et obligatoirement un CDI. Notre nouveau contrat nous permet de prendre en compte des situations plus variées et d'accepter des candidats qui n'affichent que 2,7 fois le montant du loyer. »
Christine Fumagalli regrette plus globalement l'approche « très cartésienne » que les agents immobiliers sont désormais obligés d'adopter pour se conformer à la garantie des loyers impayés souscrite par les bailleurs.« Auparavant, on pouvait avoir une analyse un peu plus psychologique en s'attachant à la fiabilité des locataires, en complément de l'analyse financière, ce qui n'est malheureusement plus le cas », conclut la présidente du réseau Orpi.
Les concubins désavantagés
Avec de tels critères de solvabilité, l'accès à la location peut être très difficile, notamment dans les zones tendues où les loyers sont élevés. Si les métiers précaires peuvent être désavantagés, c'est aussi parfois le cas des couples en union libre. Juridiquement, ils sont en effet considérés comme de simples colocataires, là où des époux et partenaires de Pacs sont liés par une solidarité légale.
« Pour les concubins, nous sommes alors attentifs, à l'étude du dossier de candidature, à ce que chacun d'entre eux puisse assumer le paiement du montant du loyer au cas où il y aurait séparation », nous indique Michaël Malbec, directeur métier groupe chez Foncia. Par excès de prudence, certaines agences imposent carrément que chacun des membres du couple gagne trois fois le montant du loyer pour répondre aux exigences de la GLI…Autant dire une vraie fortune lorsqu'on vise un T3 à 1200 ou 1 300 € ! « Ce n'est pas monnaie courante mais cela peut arriver », déplore Christine Fumagalli. Dans cette roulette russe, tout dépend donc si la chance est de votre côté.