Les conflits de voisinage sont non grata en justice. Depuis le 1er janvier 2020, vous êtes en effet obligé de passer par une procédure de conciliation ou de médiation avant d'en découdre au tribunal.
Les litiges liés au logement – conflits locatifs et de voisinage en tête – ont toujours été une thématique emblématique des petites juridictions. Suscitant passion et haine, rancœur et intransigeance ancrées au fil des années, ces affaires occupaient l'essentiel des audiences du juge de proximité, avant d'encombrer celles du tribunal d'instance après la suppression du premier en 2017. Sauf qu'au 1er janvier 2020, le TI et le TGI (tribunal de grande instance) ont fusionné au sein d'une nouvelle entité baptisée tribunal judiciaire. Pour limiter le volume de dossiers à traiter, le législateur a donc mis le paquet sur la médiation. On vous dit tout.
Des litiges spécifiques ciblés
Rappelons que la tentative d'accord amiable a été imposée dès 2016 par le législateur. Depuis lors, la procédure de conciliation préalable était obligatoire pour toute action en justice portant sur un litige civil de moins de 4 000 €. En ligne de mire, les conflits liés au logement étaient bien entendu visés, sans être spécifiés. Tout dépendait ainsi des sommes en jeu. La loi du 23 mars 2019 réformant la Justice a modifié la donne.
Depuis le 1er janvier 2020, l'obligation préalable de règlement amiable s'impose ainsi à tout litige civil n'excédant pas 5 000 € (sauf ceux liés aux crédits immobiliers et aux prêts à la consommation) mais aussi à tous les conflits de voisinage sans limite de montant. Pour ces derniers, un décret du 11 décembre 2019 précise en détail quelles actions sont concernées.
Les principaux sujets de discorde entre propriétaires sont évidemment passés en revue, comme les affaires liées au bornage d'un terrain, aux distances légales des plantations, aux règles d'élagage des arbres et haies, et aux constructions situées près d'un mur mitoyen. Le curage des fossés et canaux servant à l'irrigation des propriétés ou au mouvement des usines et moulins, ainsi que les contestations visant des servitudes instituées par le Code rural ou au profit des associations syndicales sont aussi mentionnées.
À noter : en dehors de ces cas, le juge peut de toute façon enjoindre les parties à rencontrer un médiateur qu'il désigne à n'importe quel moment de la procédure, dès lors qu'il estime qu'une résolution amiable est possible.
Le choix du conciliateur
Auparavant, il fallait forcément s'adresser à un conciliateur de justice pour tenter de trouver une solution amiable avec l'autre partie, avant de finir, en dernier recours, par s'affronter devant le juge. Mais la réforme de 2020 supprime le monopole de ce bénévole ayant travaillé dans le domaine juridique.
Désormais, les justiciables peuvent choisir entre différents modes alternatifs de règlement des litiges. Ils peuvent toujours s'adresser au conciliateur de justice qui, rappelons-le, est gratuit, ou se tourner vers un médiateur professionnel ou encore opter pour une procédure participative mise en œuvre par un avocat. Par ailleurs, les sites web privés proposant des services en ligne payants de médiation, d'arbitrage et d'aide à la saisine des juridictions voient leur activité reconnue et encadrée. La loi du 23 mars 2019 leur impose ainsi certaines conditions et exigences, dont le fait d'obtenir une certification d'un organisme agréé.
Attention : le législateur vous oblige à tenter une conciliation mais pas à conclure un accord amiable ! Si aucune entente n'est possible, c'est le tribunal judiciaire qui prendra le relais.
À qui s'adresser ?
Le secteur judiciaire a mis en place différents annuaires permettant de trouver un professionnel de la médiation :
-> les conciliateurs de justice : vous devez vous adresser au greffe du tribunal judiciaire de votre lieu de domicile pour saisir gratuitement le conciliateur local. S'il n'est pas disponible dans un délai raisonnable, vous pouvez être dispensé d'effectuer la tentative de conciliation et aller directement au procès.
-> les médiateurs professionnels : la Chambre nationale des praticiens de la médiation met un annuaire à disposition sur son site Cnpm-mediation.org. Vous pouvez sinon vous adresser à l'Association des médiateurs européens. Le barreau des avocats de Paris a par ailleurs mis en place son propre annuaire sur Mediation.avocatparis.org. De même, la Chambre nationale des huissiers de justice a créé la plateforme dédiée Medicys-consommation.fr, pour les litiges opposants les consommateurs aux professionnels.