Après avoir été contrainte de repousser la mise en place de sa nouvelle politique de confidentialité face à une volée de critiques, la populaire application de messagerie WhatsApp, propriété de Facebook, change pour de bon ses conditions d'utilisation.
La nouvelle avait fait grand bruit en début d'année. WhatsApp, l'application de messagerie instantanée aux 2 milliards d'utilisateurs à travers le monde, annonçait des changements majeurs dans sa politique de confidentialité. Propriété de Facebook, l'appli pourrait désormais communiquer un grand nombre d'informations avec le réseau social de Mark Zuckerberg. Les développeurs ne s'attendaient certainement pas à la levée de boucliers numériques qui allait suivre ce revirement de stratégie. WhatsApp enregistrait, dès janvier, la plus importante fuite de membres de son histoire, ceux-ci trouvant refuge sur Telegram ou Signal. Face à une telle défiance, les responsables ont décidé de repousser les modifications du contrat de confiance qui lie l'application à ses usagers. La date fatidique était fixée au 15 mai… tout juste le temps de faire retomber la fronde.
Une question de chiffrage
Au centre de la discorde réside la nouvelle possibilité donnée à la messagerie de communiquer certaines informations à des entreprises. Dans les faits, WhatsApp souhaite étendre à la planète entière les services et outils de ciblage qu'elle offre aux sociétés privées en Inde, son principal marché. Depuis son rachat en 2014 par Facebook, l'application transmet déjà un nombre important de données à sa maison mère. L'adresse IP des usagers, leurs numéros de téléphone ou encore certaines informations de connexion font partie de ces transmissions indiscrètes. Jusqu'en 2016, il était possible de cocher une option pour que ces échanges n'aient pas lieu. Ce n'est plus le cas depuis.
Toutefois, les responsables de WhatsApp affirment que les nouvelles conditions d'utilisation, mises en place depuis le 15 mai, n'étendent pas le champ de la collecte. Pas question, par exemple, d'espionner les conversations ou de s'immiscer dans les groupes de discussion, contrairement à ce qui a pu être colporté par de nombreuses rumeurs. Contrairement à Instagram ou à Messenger, autres propriétés de Facebook, les messages WhatsApp sont cryptés de bout en bout. Chaque échange est transformé en une suite de caractères impossibles à déchiffrer si l'on ne possède pas la bonne clé. Et seul le destinataire la détient. WhatsApp assure ainsi ne pas détenir les clés privées, rendant impossible toute transmission indiscrète.
L'idée de la nouvelle politique est en revanche de permettre aux entreprises qui le souhaitent de communiquer avec leurs clients via l'application et de pouvoir conserver des informations relatives à ces échanges. Si un usager converse avec le service clients d'une société, celle-ci pourra faire transiter les messages, les stocker ou les analyser afin d'améliorer ses prestations ou de peaufiner sa stratégie marketing. Pour faire simple : les conversations vers les comptes d'entreprises ne seront pas chiffrées.
Beaucoup de bruit pour rien ?
Sur le papier, cette nouvelle donne n'a donc pas de quoi effrayer outre mesure les utilisateurs. La défiance reste toutefois entière. Il faut dire que les usagers sont échaudés par les innombrables entorses de Facebook aux règles d'utilisation et de confidentialité des données personnelles. Le crédit du groupe est écorné. Les autorités européennes sont d'ailleurs sur la même ligne et restent vigilantes. « Les informations sur les transferts de données sont éparpillées à différents passages de la déclaration de confidentialité, manquent de clarté, et il est difficile de distinguer le texte concernant les citoyens européens de celui pour le reste du monde », a estimé, dans une décision du 11 mai, l'Autorité de protection des données de Hambourg, en Allemagne, demandant au passage le non-déploiement de la mise à jour outre-Rhin. Facebook a fait appel et a tout de même changé ses conditions d'utilisation, ouvrant une nouvelle fois les hostilités. Signal et Telegram, les applications concurrentes, se frottent les mains.
