Face aux situations récurrentes de sécheresses et de restrictions d'eau induites par le réchauffement climatique, tous les moyens sont bons pour limiter les gaspillages d'eau et augmenter l'efficacité des arrosages. À ce petit jeu, l'arrosage en profondeur a un bel avenir devant lui.
Avant de pouvoir vagabonder sur les mers du Sud à bord du Marie-Thérèse, Bernard Moitessier dut économiser, piastre après piastre, le financement de sa première expédition à la voile en solitaire. Toute sa vie durant, il gardera en mémoire l'adage qu'un vieux sage chinois lui avait alors prodigué : « Mon petit, souviens-toi que l'argent se gagne en deux temps : premier temps, tu le fais rentrer ; deuxième temps, tu l'empêches de sortir ». Au jardin, l'eau est un bien sans doute encore plus précieux que l'argent. Alors d'abord tu l'envoies dans le sol, et ensuite, tu l'empêches de s'évaporer.
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L'arrosage en profondeur consiste à irriguer directement le sous-sol, plus ou moins profondément selon les besoins des végétaux, afin de réduire les pertes en eau au plus près des racines. Communément, on parle d'une profondeur de vingt centimètres pour les vivaces, quarante pour les arbustes et soixante-dix pour les arbres. Ainsi mise à l'abri de l'air, du soleil et du vent, l'eau s'évapore peu, et reste entièrement disponible pour les plantes. Et puisqu'il y a peu de pertes d'eau, on peut alors réduire la fréquence des arrosages et donc réduire drastiquement sa consommation. L'arrosage profond vient en complément des autres pratiques qui permettent de limiter l'évaporation : irrigation en dehors des heures chaudes, paillage épais, ombrage des végétaux fragiles ou encore plantation de haies brise-vent.
Dès la plantation… ou après
Pour distribuer l'eau en profondeur, il faut disposer d'un puits d'irrigation constitué d'un conduit enterré aux trois quarts. Il est évidemment plus facile de l'installer au moment de la plantation, d'autant plus que cela est très profitable aux jeunes plantes. Cependant, puisqu'à mesure que celles-ci grandissent, leurs racines se développent en s'éloignant du tronc, on peut aussi l'installer après, d'autant que le réseau racinaire d'une plante est à peu près proportionnel au volume de sa ramure. Autrement dit, sous terre, les racines se développent jusqu'à la frondaison du feuillage, ce qui permet, sur des sujets adultes, d'enterrer un puits d'arrosage bien à l'écart du tronc et d'éviter de blesser les racines principales.
Un puits de taille variable
Il faut définir le diamètre du conduit en fonction du type d'arrosage que l'on adopte. Dans le cas de l'arrosage manuel au tuyau ou à l'arrosoir, mieux vaut prévoir des conduits de gros diamètre (10 cm environ), qui vont permettre d'amener une grande quantité d'eau d'un coup et de faire office de réservoir temporaire si le sol ne parvient pas à tout absorber en temps réel. À l'inverse, pour l'arrosage au goutte-à-goutte, beaucoup plus lent, que l'on pratique à l'aide de goutteurs fichés au bout de petits tuyaux capillaires qui plongent dans le conduit, un diamètre de quatre à cinq centimètres est largement suffisant.
Un aménagement temporaire
L'autre objectif de l'arrosage en profondeur est d'encourager la plante à développer ses racines vers le bas, afin d'y trouver à terme une humidité résiduelle qui la rendra, on l'espère, autonome en eau. Il n'est donc pas appelé à rester à demeure, quoiqu'il doive généralement être maintenu plusieurs années durant. Les matériaux de récupération sont évidemment à privilégier, durables si possible, tels que les tubes métalliques, les tubes en PVC, les gaines de BTP ou les tuyaux rigides, même si malheureusement, ils sont en plastique.
Tout pour la plante
Dans un sol privé d'arrosage en surface et recouvert d'un épais paillage organique, les herbes indésirables se font rares, ce qui réduit la concurrence pour l'accès à l'eau.