La clef d'un sol productif repose en grande partie sur sa pédofaune. Par son activité frénétique, cette clique d'organismes divers en assure naturellement le bon fonctionnement. Parmi eux, le lombric, indiscutable premier ouvrier de France, un ver de terre dont le travail incessant profite largement aux plantes… et au jardinier.
N'en déplaise aux toutous, le meilleur ami du jardinier, c'est le lombric. Il prend sur lui d'assurer la fertilité de votre sol, pour peu que vous preniez, vous, la peine de lui offrir le gîte et le couvert. À défaut d'aboyer quand la caravane passe ou de ramener le bâton que vous lui lancez, le ver de terre est toujours là pour votre sol. Avoir un bon copain, voilà ce qu'il y a de meilleur au monde !
De qui parle-t-on ?
Le lombric (Lumbricus terrestris) est l'un des plus gros organismes constituant la faune de nos sols. C'est le représentant le plus fameux des quelque sept mille espèces de lombriciens connues, et comme eux, il se nourrit de matières organiques en décomposition (feuilles, tiges, fruits, etc.). C'est un ver de terre « anécique », c'est-à-dire qu'il fait des allers-retours permanents entre la surface, où il trouve sa nourriture, et la profondeur, où se trouve son nid.
Le ver créateur
Pour se déplacer, le lombric emprunte des galeries qu'il creuse en avalant la terre. Les excréments qu'il dépose à la surface du sol, sous forme de turricules, sont donc un mélange de matières organiques digérées et d'argile. C'est en passant dans son tube digestif qu'elles se soudent les unes à l'autre. Cet assemblage d'humus et d'argile constitue ce que l'on nomme le complexe argilo-humique, en somme, le sol parfait.
Le ver aérateur
Par ses galeries, le lombric crée des puits d'aération par lesquels l'oxygène et l'eau de pluie parviennent à pénétrer dans le sol. Elles constituent donc des voies de pénétration faciles que les racines, qui ont besoin d'eau et d'oxygène, empruntent prioritairement. On compte en moyenne, dans une prairie fertile, environ 400 mètres de galeries par mètre carré, pour deux à trois kilos de vers. Enfin, mieux qu'un bêchage, ce mitage du sol empêche le compactage, ce qui est d'autant plus appréciable dans les sols argileux.
Le ver nourrisseur
Les turricules déposés en surface sont lentement décomposés par des micro-organismes, ce qui les enrichit en éléments minéraux. Réenfouis par la pluie ou l'activité d'une pédofaune plus petite, ils forment un engrais naturel extrêmement nutritif. Mais le lombric produit également de l'azote contenu dans son mucus. Ce liquide corporel, qu'il excrète à travers l'épiderme, lui sert à la fois d'enduit pour durcir et stabiliser les parois des galeries, mais aussi de lubrifiant, pour l'aider à s'y mouvoir. Cet azote, qu'il a initialement puisé dans sa nourriture, est rapidement mis à disposition des plantes. Quant à son urine, c'est de l'azote ammoniacal pur, directement assimilable par les racines.
Prendre soin des vers
Le gîte et le couvert, voilà tout ce que réclame le lombric pour s'installer dans votre jardin. Un paillis organique permanent disposé sur le sol permet de le nourrir en abondance. Proscrivez l'usage du motoculteur, véritable machine à déchiqueter les lombrics, mais aussi le bêchage, qui détruit leur habitat et privilégiez l'aération sans labour du sol, avec un outil de type grelinette. Enfin, évitez les produits pesticides auxquels ils sont très sensibles. À commencer par le cuivre, et la fameuse bouillie bordelaise, certes « bio », mais toxique pour les vers.
Grâce à qui, p'tit bonhomme ?
C'est à Marcel Bouché que l'on doit les premières études scientifiques sur les vers de terre. Entamés dans les années 1970, les travaux de ce maître incontesté font encore référence aujourd'hui.