Lorsqu'en fin d'été le jardinier croule sous les récoltes de fruits, ou que, inattentif à leur maturité, il les cueille trop blets, il existe une manière de les valoriser en une noble matière : le cuir. Cette pâte de fruit à la finesse épidermique permet de sublimer des cueillettes, sous toutes les formes et pour tous les goûts.
Nos amis vegans seront heureux d'apprendre qu'il existe une sorte de cuir dont ils vont enfin pouvoir profiter sans états d'âme. Avec lui, point de souffrance animale, ni même de peau tannée, car il est élaboré à base de fruits. Il permet au cuisinier toutes les audaces gustatives et au jardinier de limiter les gaspillages. Amateurs de ceintures, férus de mocassins, passez votre chemin, car le cuir dont on parle ici n'est pas fait pour se vêtir mais pour se régaler.
Une nouveauté pas si récente
Le cuir de fruit est une des nouvelles tendances culinaires du moment, bien qu'elle ait, comme c'est souvent le cas, déjà de nombreuses décennies d'existence derrière elle. Inspiré de recettes traditionnelles du Moyen-Orient et d'Europe centrale, le cuir de fruits est très similaire à la pâte de fruits, mais s'en distingue par deux détails essentiels : la cuisson et l'épaisseur.
Une pâte de fruits crue
Le cuir de fruit est une fine lanière de purée de fruits crus déshydratée, de 5 à 10 mm d'épaisseur. Puisque son élaboration nécessite des fruits en abondance, et si possible bien sucrés, c'est une manière originale de valoriser les abondantes récoltes des fruits du jardin. S'ils sont un peu trop mûrs, le cuir n'en sera que plus savoureux. L'absence de cuisson offre l'avantage de préserver tous les nutriments et les minéraux et de concentrer les saveurs.
Un large spectre
Tous les fruits du jardin peuvent être transformés en cuir, de la fraise à la pomme, en passant par le kiwi ou la rhubarbe. Même les légumes-fruits du potager peuvent s'y prêter : tomates, poivrons, courges… La méthode est d'autant plus intéressante qu'elle permet une conservation de plusieurs mois au réfrigérateur. Voici quelques associations fameuses du moment : fraise-basilic, pêche-gingembre ou encore prune-banane.
La recette
Après avoir pelé et épépiné vos fruits, mixez-les afin d'obtenir une purée onctueuse que vous étalerez sur une feuille de papier sulfurisé. À vous d'en définir l'épaisseur : fine feuille ou plaque plus épaisse. Enfournez le tout à une température de 50 °C durant cinq à dix heures selon les fruits, afin de déshydrater la purée sans la cuire. Le cuir est prêt lorsque les coins se décollent facilement et qu'un doigt peut s'y poser sans laisser d'empreinte. Une fois sec, découpez le cuir en lanières que vous enroulerez sur elles-mêmes avec le papier sulfurisé, pour la conservation.
Les digressions
Les purées trop liquides comme celles de la tomate, de la pomme ou de la poire peuvent être épaissies avec de la poudre de fruit sec (amande, pignon, noix, noisette…) ou de la banane. Vous pouvez extraire l'excès de jus afin de réduire le temps de cuisson, mais vous réduirez d'autant les saveurs. Pour les fruits acides, l'ajout de dattes séchées, de miel ou de sirop d'agave peut s'avérer judicieux. Au final, en mélangeant fruits ou épices dans le cuir puis en associant celui-ci avec d'autres mets sucrés ou salés, les possibilités d'associations donnent le vertige.