Avec le mois d'avril revient le temps des tontes, mais aussi celui des tombereaux d'herbe coupée hautement fermentescibles. S'il paraît évident qu'il faut s'efforcer de valoriser cette ressource au sein même du jardin plutôt que de l'évacuer à la déchetterie, la besogne n'est pas simple. Voici plusieurs façons de la recycler.
Attention danger ! L'herbe coupée est une matière organique fortement azotée, molle et humide, qui a la fâcheuse tendance, lorsqu'on la met en tas, à se compacter et à fermenter. Il en résulte une putréfaction active, dont l'odeur nauséabonde ne laisse généralement pas insensible le voisinage. À l'inverse de la plupart des matières organiques générées par l'entretien du jardin que l'on peut mettre en tas dans l'insouciance la plus totale, l'herbe coupée requiert une prise en charge millimétrée.
Recycler au compost
Le compostage des déchets de tonte demande une bonne organisation. Étant donc très azotés, verts, mous et humides, ils ont besoin, lorsqu'on les met en tas, d'être mélangés à parts égales avec des déchets carbonés, bruns, durs et secs afin de limiter le tassement. Leur présence structurante maintient une circulation d'air minimum qui permet d'éviter la fermentation malodorante. En l'absence de ces feuilles mortes, paille, foin ou aiguilles de pin, l'apport au compost peut être envisageable à condition que celui-ci soit aussi volumineux que le tas d'herbe, et surtout, qu'il soit méticuleusement mélangé avec lui. Cette arrivée massive d'herbe fait monter la température du compost, ce qui accélère le processus de décomposition.
Délicat paillis
L'herbe coupée est un excellent matériau de paillage à déposer au pied des plantes ornementales ou potagères pour fertiliser le sol, limiter l'évaporation de l'eau et le développement des mauvaises herbes. Elle s'y décompose rapidement en nourrissant les plantes en azote. Cependant, l'herbe fraîche, très humide, doit être utilisée avec méthode et rigueur, car lorsqu'elle est déposée en trop grosse quantité, nous l'avons vu, elle fermente. Elle se transforme alors en pâte visqueuse odorante et ammoniaquée (avec risque de brûlure des plantes fragiles), qui, une fois séchée, forme une croûte imperméable à l'eau.
Paillis sec et paillis frais
Il existe deux solutions pour utiliser les déchets de tonte en paillis : les faire sécher quelques jours en petits andains avant d'utiliser l'herbe jaunie comme n'importe quel paillis, jusqu'à dix ou vingt centimètres d'épaisseur, ou alors utiliser l'herbe fraîche, ce qui est la méthode la plus rapide et la plus simple, en veillant à ne pas excéder trois centimètres d'épaisseur de paillage.
Matière à lasagnes
Particulièrement riches en azote, les déchets de tonte constituent également un élément de choix pour ériger des lasagnes. Ces buttes de culture hautement productives sont formées de couches successives d'une dizaine de centimètres d'épaisseur de matières azotées, de matières carbonées, et de terre ou de compost, chaque couche étant saturée en eau au moment de sa mise en place. Au printemps, la difficulté consiste essentiellement à disposer de matières riches en carbone plutôt que d'herbe fraîche. Cela dit, même informelle, même constituée de peu de couches, la lasagne est un support de culture extrêmement fertile, à ne pas négliger au potager.